Introduction.
Depuis plusieurs années déjà les
constructeurs de berline de luxe sportive se livrent une bataille
effrénée quant à qui aura le plus de chevaux vapeur sous le capot.
Cette guerre des chevaux vapeurs ou «horsepower wars» comme l’appel
nos amis anglophones, a débuté avec les constructeurs de luxe
allemand tels qu’Audi et BMW, il y a de cela déjà plus de 30 ans.
BMW tira la première salve avec ses véhicules dits M, et ces deux
concurrents principaux emboîtèrent le pas peu après avec les RS
chez Audi et les AMG chez Mercedes. En tant que bon Américain, GM ne
pouvait laisser cette part du marché aux Allemands surtout que Lexus
venait de prendre part aux hostilités avec la IS-F et maintenant la
GS-F. C’est donc dans ce contexte que fut née la première
Cadillac CTS-V en 2004. La CTS-V de l’époque était une version
survitaminée de la CTS de base avec un moteur V8 tout droit sorti de
la Corvette. Ce fut un bon succès à l’époque et le modèle fut
reconduit à chaque nouvelle génération en gardant plus ou moins la
même recette, pour en arriver au modèle que j’ai eu la chance
d’essayer, soit la CTS-V 2018. Donc, je vous propose mes
impressions de conduite de ce bolide très spécial.
Design, intérieur et finition.
Perso, j’aime bien le design des
nouvelles Cadillac. Les arrêtes carrées et coupées au laser des
premières années sont maintenant quelque peu arrondis et plus
conventionnelles. Cela n’empêche pas qu’on remarque
instantanément une Cadillac sur la route sans que le tout soit trop
ostentatoire. Fini les chaloupes bardées de chrome, on a maintenant
droit à un style d’inspiration européenne, mais tout de même
unique à la marque américaine. La CTS monte en dimensions et en
gamme chez Cadillac alors le style est plus assagi que par le passé.
La version V s’identifie facilement grâce aux différents ajouts
de carrosserie. Bonus, tout est fonctionnel et sert soit à améliorer
le coefficient de trainée ou augmenter l’appui aérodynamique à
haute vitesse.
La finition aussi a fait des pas de
géants pour un produit GM. Les panneaux de carrosserie sont bien
ajustés et la peinture est de qualité. Le look intérieur est tout
aussi intéressant qu’à l’extérieur. Les matériaux sont de
bonne facture et l’assemblage digne de ce nom. Les sièges sport en
cuir avec le logo V sont particulièrement efficaces. Ils offrent un
bon support et sont confortables. À mettre dans votre liste
d’options pour sûr. Tout comme le volant sport recouvert
d’Alcantara. Néanmoins, certains compétiteurs font encore mieux
dans ce domaine tel que Audi, qui est tout simplement le maître
incontesté en la matière. Côté design j’aime mieux celui de
Mercedes-AMG qui est tout aussi sportif, mais beaucoup plus classique
et intéressant.
Malgré le gabarit imposant de la
voiture, l’espace à l’intérieur y est quelque peu compté. Mes
jambes sont à l’étroite ce qui fait que mes genoux cognent sur le
tableau de bord et l’encart de porte. Outre ce détail agaçant, la
position de conduite est parfaite et on est très bien tenue en place
en conduite sportive ce qui arrive assez souvent à bord de la CTS-V.
À l’arrière ce n’est guère mieux côté espace. Par contre, le
coffre est conséquent. À la défense de la CTS, c’est la même
chose pour la plupart de ses concurrentes. Côté système de son et
info divertissements, malheureusement, je ne peux pas vous en dire
beaucoup. Mon essai routier était assez court, donc j’ai préféré
me concentrer sur la conduite de la voiture. Je vous dirai seulement
que la CTS-V est équipée d’un système de son Bose à 13
haut-parleurs, le tout intégré au système de reconnaissance vocale
CUE. Ce dernier n’était pas des plus commodes dans ces anciennes
versions, mais celle de 2018 semble quand même plus conviviale. De
mon côté, je préfère écouter la sonorité course du V8. Ce
dernier est très bien filtré, seuls les sons intéressants
pénètrent dans la cabine et les vibrations désagréables sont
laissées à l’extérieur.
Comportement routier.
Parlant du V8, ça en est tout un! Il
provient littéralement de la Corvette Z06. C’est-à-dire, le
fameux LT4 avec compresseur volumétrique. Ce moteur est la 5ième
génération du légendaire «small block V8» de chez Chevrolet.
Dans la version qui nous intéresse, il déplace 6,2 L, reçoit
l’injection directe et un arbre à cames central avec poussoir.
Malgré cette technologie quelque peu dépassée, GM a quand même
réussi à offrir un système à variation continue tant sur la levée
et le temps d’ouverture des 32 soupapes. De plus, le moteur peut
couper l’alimentation en essence dans un ou plusieurs cylindres
pour plus d’économie. Dans la Corvette standard, ce V8 est bon
pour 450 Hp, mais comme je vous le disais plus haut, c’est celui de
la Corvette Z06 qui se retrouve sous le capot. Le V8 LT1 standard
reçoit donc une panoplie de modifications. Les plus importantes
sont, des culasses en aluminium spécifiques et optimisées, des
pistons et bielles forgés, des soupapes en titane, le tout faisant
grimper le taux de compression à 10 :1. Ensuite, le système de
lubrification standard est remplacé par un carter sec pour plus de
fiabilité et une pression constante lors de manœuvres violentes.
Comme si ce n’était pas assez on ajoute un compresseur
volumétrique à double volute Eaton TVS sur le dessus. La puissance
monte ainsi à 640 Hp pour 6 400 tr/min. tandis que le couple est de
630 lb-ft à 3 600 tr/min. Et voilà le LT4 en quelques mots.
Sur la route, cela donne des
performances à couper le souffle, littéralement. En ligne droite et
lorsque la chaussée s’y prête, les accélérations sont carrément
douloureuses. Vos yeux et votre poitrine restent sur place tandis que
le reste de la voiture accélère comme une démone. La faute aux
immenses pneus Michelin Pilot Super Sport en 295/30ZR19. L’avant
n’est pas moins bien traité avec des 265/35ZR19. En mode Track, il
est possible de faire un fameux «burnout», mais ces pneus ne vous
laissent pas jouer longtemps, après quelques mètres, ils ont déjà
retrouvés leur motricité et vlan, vous voilà repartit comme une
fusée. Seule ombre au tableau, la transmission, qui est la classique
6 vitesses de GM. Je n’aime vraiment pas cette transmission, elle
est stupide (lisez ici qu’elle ne change pas de rapport au moment
opportun) et pas très confortable. Avec 640 Hp sous le capot, les
changements de vitesse sont brutaux sans être rapide pour autant.
C’est encore plus vrai lorsque la voiture est en mode Sport ou
Track. On a l’impression d’avoir un apprenti conducteur qui
s’occupe de changer les rapports pour nous. Bref, c’est le point
faible de la CTS-V.
Le châssis lui est super. On parle
d’une suspension magnétorhéologique MacPherson à l’avant et
multibras à l’arrière. Évidemment, le tout est revu par rapport
à la CTS standard ainsi que le système de contrôle de la stabilité
StabiliTrak. Vous vous demandez surement qu’est-ce qu’une
suspension magnétorhéologique, eh bien ce sont tout simplement des
amortisseurs remplis d’un liquide magnétique. Lorsqu’un courant
les traverse, le liquide change de viscosité, ce qui fait que les
amortisseurs deviennent plus ou moins raides. On peut ainsi varier en
continu le degré de fermeté de la suspension. Le système est si
perfectionné et rapide qu’il peut réagir aux bosses et trous de
la chaussée au moment où la roue y pénètre. Le tout a été conçu
et réglé par MultiMatic une compagnie canadienne qui s’était
aussi occupée de la dernière Camaro Z/28. Donc, en mode Comfort,
devinez quoi, la CTS-V est aussi confortable qu’une CTS standard.
Le tout demeure quand même assez ferme, une grande berline style
Cadillac XT6 ou Lincoln Continental est plus douce. Par contre, la
CTS-V, lorsqu’en mode Sport ou Track, devient beaucoup plus raide
et sur une bonne vieille route québécoise, c’est dur pour vos
lombaires. Par contre, on gagne en tenue de route et feeling de
conduite.
Au volant, on sent très bien tous les
efforts mis lors de la conception. Le devant de la voiture est
incisif et précis et l’arrière suit au doigt et à l’œil. Le
grip est impressionnant surtout pour une voiture de cette taille et
les changements de direction se font instantanément. On a un peu de
feedback dans le volant ce qui permet de bien sentir ce que la
voiture veut faire. J’en aurais aimé plus, mais c’est suffisant
pour la route ouverte et honnêtement, personne n’ira sur un
circuit avec cette voiture. Avec toute cette puissance, on a besoin
de bons freins et le système Brembo répond présent. L’attaque à
la pédale est franche et la puissance est tout aussi douloureuse que
lors des accélérations.
Si vous savez ce que vous faites un
peu, la CTS-V vous fera perdre votre permis dans moins de temps qu’il
ne faut pour lire cette phrase. Sinon, c’est le décor qui vous
attend, il est tout simplement impossible d’approcher de ses
limites sur la voie publique. Cadillac nous annonce un 0-100 km/h en
3,8 secondes, on continue jusqu’à 160 km/h en 8,1 secondes et 12
secondes plus tard on est rendu à 240 km/h. Selon «Car and Driver»
le ¼ de mile se ferait en 12,0 secondes à 195 km/h et la CTS-V
s’arrêterait à partir de 113 km/h en 44,4 mètres. Cadillac eux,
affirme que leur bolide peut filer jusqu’à une vitesse maxi de 322
km/h. Malheureusement, je n’avais pas mon chrono avec moi lors de
mon essai, mais je peux vous dire qu’au feeling je n’ai aucun
doute que la CTS-V peut effectuer ce genre de performances, et ce à
maintes reprises.
Fiabilité et coût de possession.
La réputation du fameux moteur «Chevy
small block» n’est plus à faire. Comme le LT4 est en fait la
5ième génération de celui-ci, je ne vois pas de gros problème de
fiabilité à l’horizon. Par contre, il est quand même un peu plus
compliqué que votre V8 de pick-up standard. La facture d’entretien
risque d’être plus salée et il faudra respecter la cédule
d’entretien religieusement. C’est un moteur sportif donc c’est
normal. Ce qui m’inquiète le plus dans la CTS-V, c’est la
transmission. Avec toute la puissance qu’elle doit absorber, elle
risque de servir de fusible au train moteur. Surtout que le design de
GM n’est pas des plus fiables. Aussi, restera à voir ce que le
manque de refroidissement moteur pourrait faire à la fiabilité à
long terme. Lors d’interview, les ingénieurs qui ont conçu la
CTS-V, ont affirmé que cela a été un de leurs plus grands défis
avec cette dernière.
Le véhicule est garanti pare-chocs à
pare-chocs 48 mois et/ou 80 000 km. Le moteur et la transmission le
sont jusqu’à 6 ans et/ou 110 000 km. C’est tout de même très
intéressant et c’est beaucoup mieux que la concurrence dans ce
segment. Par contre, les coûts d’entretien sont assez élevés
chez Cadillac. C’est d’autant plus surprenant que le véhicule
est entretenu au côté de vulgaire Chevrolet Spark ou GMC Sierra.
Mais disons que si vous avez les moyens de vous payer une CTS-V
neuve, vous devriez être capable de l’entretenir convenablement.
Parlant d’acquisition, louer le véhicule. La dépréciation est
assez intense sur ce genre de voitures.
Conclusion.
Avant l’arrivée de la Mercedes-AMG
E63 S sur le marché au début de l’année, la CTS-V était la
voiture la plus puissante de sa catégorie. Est-ce que cela en
faisait la meilleure voiture de la dite catégorie? Eh bien, c’est
moins certain. Chaque véhicule dans cette classe, qui comprend la
Audi RS7, la BMW M5, l’Alfa Romeo Giulia Quadrifoglio, pour n’en
nommer que quelques-unes, a son caractère bien à lui. La RS7 par
exemple est moins puissante que la CTS-V, mais profite d’un
excellent système quatre roue motrice quattro. L’attrait de la BMW
M5 réside dans son moteur extraordinaire et ainsi de suite. Je n’ai
conduit que la RS7 dans le lot et je dois dire que la CTS-V est
beaucoup plus agile et plaisante à conduire que la Audi. Par contre,
cette dernière reprend la tête du peloton quand les conditions sont
mauvaises ou la route bosselée. Bref, la CTS-V est une réussite
reste à voir votre goût personnel. Par contre, il demeure un fait
indéniable, elle est beaucoup moins chère que ses concurrentes.
Design : 4/5
Motorisation : 5/5
Tenue de route : 5/5
Fiabilité et coût de possession :
3/5
Score final : 17 / 20